Le Sénat a été, la semaine passée, le théâtre d’un drame en trois actes qui aurait pu s’achever sur une réforme majeure de la principale allocation venant en aide aux personnes âgées dépendantes, l’APA (Allocation Personnalisée d’Autonomie). Une réforme qui aurait pu passer en catimini, à la faveur d’un amendement à la loi de Finances pour 2008, subrepticement ajouté lors d’une séance nocturne au Sénat, il y a précisément une semaine. Fort heureusement, les protestations nombreuses et la réaction appropriée du gouvernement ont empêché l’irréparable d’être commis. Explications.
Un amendement prévoyait la récupération de l’APA sur la succession
A l’origine du tollé, un amendement déposé dans la nuit de lundi à mardi 10 décembre par les sénateurs Philippe Marini (UMP) et Jean Arthuis (Modem). L’amendement prévoyait de permettre la récupération par les départements des sommes versées au titre de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), après le décès du bénéficiaire.
A compter du 1er janvier 2009 et dès lors que l’héritage (ou « actif successoral ») aurait dépassé la somme de 100 000 euros, les héritiers auraient dû, selon l’amendement en question, rembourser l’aide perçue au titre de l’APA.
Levée de bouclier des professionnels du secteur médico-social
L’amendement voté sans bruit à la faveur d’un vote nocturne va bien vite déclencher un tollé. Une association de professionnels parle même de « provocation », tous estiment que la question du financement de la dépendance mérite un large et vaste débat, plutôt qu’un amendement voté à la sauvette.
Le gouvernement s’oppose même à la mesure, par la voix de Valérie Letard, Secrétaire d’État à la Solidarité, en charge des Personnes Âgées, qui profite des séances de questions au gouvernement, à l’Assemblée Nationale, mercredi 12 décembre, pour demander la suppression de l’amendement.
Un retour à la PSD pour l’instant évité
Avant la création de l’APA, en 2002, la Prestation Spécifique Dépendance[1] (PSD) était elle aussi récupérable sur l’héritage. Résultat : moins de 150 000 bénéficiaires enregistrés. Ce qui a fait le succès de l’APA, dès sa mise en œuvre, consiste précisément en son caractère d’aide non remboursable et universelle.
Plus d’un million de bénéficiaires profitent de l’allocation, dont le coût, certes largement sous-estimé par ses créateurs, retombe lourdement sur les épaules des conseils généraux départementaux, c’est pourquoi l’APA est si souvent remise en question. Finalement, lors de sa séance du jeudi 13 décembre, la Commission Mixte Paritaire (CMP), n’a pas retenu l’amendement tant décrié au sein de la Loi de Finances 2008.
Le vrai débat aura lieu courant 2008
Le directeur de l’association des directeurs d’établissements et services pour personnes âgées (AD-PA), M. Pascal Champvert, s’est déclaré satisfait de « l’échec de l’amendement du Sénat. »
La question du financement de la dépendance « mérite d’être abordée dans le cadre global du chantier du cinquième risque », a estimé quant à elle la Secrétaire d’État, Madame Valérie Letard. On ne pourra néanmoins éviter de tenir un vrai débat sur le financement de la dépendance, qui aura lieu au printemps 2008.
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[1] Dépendance
La dépendance de la personne âgée désigne le besoin d’aide pour réaliser les tâches de la vie quotidienne en raison de problèmes physiques ou mentaux.
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